Péniches, barges… le transport au fil de l’eau
Rivières et canaux : des « autoroutes » liquides !
Resté sans concurrence pendant plusieurs générations, le transport fluvial est une tradition ancienne qui a dû faire face dès le milieu du XIXème siècle, à l’avènement du rail. En 1879, le ministre De Saulce De Freycinet va faire voter un programme de grands travaux pour le creusement de nouveaux canaux uniformisés, mais aussi pour la modification des cours d’eau (rectification des berges, endiguement, dragage…). Entre 1880 et 1900, les voies navigables principales vont passer de 1450 km à 4739 km !
Cette modernisation va donner naissance à une nouvelle batellerie « de canal », principalement dans les régions du Nord, du Centre et de l’Est de la France. Le halage est effectué par des animaux de trait, mais aussi par des hommes de peine « tirant à la bricole »… et parfois même par les propres membres de la famille du marinier.
La « mécanisation » du halage… une alternative séduisante mais peu convaincante.
Les progrès techniques permettent généralement un gain de vitesse et un allègement considérable de la peine des hommes. Leur application au halage est toutefois compliquée ! Dès les années 1890, des essais par tracteurs à vapeur et électriques se multiplient. Las ! les premières locomotives routières endommagent les chemins de halage, effraient les attelages et suscitent l’hostilité de la profession batelière. Dans le Nord de la France, de nouvelles compagnies de traction sur berge voient le jour, financées par les sociétés minières, grosses demandeuses de transport par voie d’eau. Ces compagnies vont utiliser des tracteurs électriques de halage, circulant sur des voies ferrées spécialement construites à cet effet. De telles infrastructures sont toutefois impossibles à généraliser sur toutes les berges. Dans les années 30, les petits tracteurs Latil TL, bien adaptés aux chemins de halage, vont tenter de remplacer les chevaux mais leur usage restera assez limité.
La motorisation des bateaux : en route vers le progrès !
Parallèlement à la batellerie de halage, de puissants bateaux remorqueurs à vapeur, puis à moteur diesel font leur apparition sur les plus grosses voies navigables. Ils peuvent tirer un « train » de 2 à 10 péniches pour les plus performants. De véritables compagnies spécialisées se multiplient (Société Générale de Navigation Fluviale, Compagnie Fluviale des Transports et Remorquages, Compagnie de Navigation Le Havre-Paris-Lyon-Marseille, Union Normande, Compagnie pour la Navigation du Rhin, etc. etc.)
Sources : ROBLIN Laurent.- Cinq siècles de transport fluvial.- 2003 : Ed. Ouest-France.
Apparues dans les années 30, les péniches motorisées modernes, mues par un moteur diesel, se généralisent après la guerre. Baptisées « automotrices », elles ont un gabarit standardisé de 39 m de long, de 5 m de large et leur enfoncement est de 1,80 m. Le chargement moyen est de 250 tonnes de fret.
La fin des années 1950 voit également l’émergence d’une nouvelle technique : le poussage. Cette pratique va se substituer au remorquage, sur les fleuves et les rivières à grand gabarit. Un bateau « pousseur » de forte puissance propulse devant lui une, voire plusieurs barges longues et plates, assemblées de façon rigide. L’ensemble du « train de poussage » se conduit comme un unique bateau. Face aux entreprises de grosse batellerie munies de bateaux pousseurs, les petits mariniers indépendants tentent de rester compétitifs. Il vont ainsi motoriser plus fortement leur péniche automotrice, de façon à pouvoir pousser une barge additionnelle de taille moyenne ou une seconde péniche transformée en barge.
La photo suivante date de 1966 et montre une barge fraichement produite d'un atelier de Jassans-Riottier (Rhône).
Bien qu'elle soit un modèle de petite dimension, son transport par la route est délicat !
le camion qui s'en charge ici, est le vénérable Berliet GDR d'un transporteur de grumes, avec sa triqueballe.
Berliet, un leader français des moteur « marins »
L’entreprise Berliet va se positionner parmi les fournisseurs « phares » de moteurs diesel spécifiquement dédié aux bateaux. Appelés « groupes marins », ces ensembles rigides sont composés d’un moteur accolé à un inverseur-réducteur. Entre 1950 et 1960, ils sont distribués par le concessionnaire CÉGÉ (Puteaux), puis SEMI (Courbevoie).
Les moteurs sont construits sur le site Berliet de Monplaisir. Ils sont plébiscités pour leur puissance et leur simplicité. Les mariniers apprécient également les performances du service après-vente Berliet, la disponibilité et le faible coût des pièces de rechange. A partir du milieu des années 60, pas moins de douze groupes « M » Magic, composent une gamme allant de 70 ch et 500 ch !
Pourquoi Berliet « Groupes Marins » ?
Le « boom » économique des années 60 offre un terrain propice à la diversification des marchés. Parallèlement aux véhicules utilitaires, Berliet entend affirmer sa présence dans d’autres domaines offrant une belle visibilité pour l’image de marque : les infrastructures, le génie civil, la construction navale etc. La production de moteurs marins et de groupes industriels, constitue à ce titre un secteur d’activité très intéressant et vite rentabilisé. Le géant lyonnais possède en effet un outil industriel bien rôdé pour la production en grande série, ainsi qu’un bureau d’études performant pouvant répondre aux spécificités de tels moteurs. Ces groupes marins sont d’ailleurs dérivés des autres moteurs de la marque.
Outre la motorisation de bateaux neufs, le remplacement de moteurs sur des embarcations plus anciennes est en plein essor, tant dans le domaine marin que fluvial. Ainsi, les pêcheurs méditerranéens équipent leurs bateaux afin de pouvoir optimiser la pêche au chalut. Du côté du transport fluvial, les mariniers « boostent » leurs péniches pour diminuer leur délais de livraison et pour pouvoir pousser du fret sur barge. Dans tous les cas, il faut un moteur qui « arrache » !… un Berliet, bien sur !
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